Samedi 8 juillet 2023 – Mairie de Pau – 10 h 30
Il n’y avait pas de vidéo ce 14 juin à Angoulême : deux semaines avant l’assassinat de Nahel, un policier avait abattu Alhoussein Camara[1]. Même schéma que pour Nahel : un refus d’obtempérer, dit la Police. Alhoussein était arrêté à un feu rouge. Il n’y avait pas de témoins. Il ne reste que la version de la police. Mais dit-elle vrai ? Alhoussein était un jeune de 19 ans, guinéen, un mineur étranger isolé devenu majeur, titulaire d’un CAP, et du permis B . Il se rendait à son travail ce matin-là. Il n’est jamais arrivé. Ses amis, son entourage ne comprennent pas : Alhoussein était un jeune sans problème, sans casier, en train de s’intégrer paisiblement en France.
Alhoussein était étranger. Nahel était français.
« Oui mais Français comment ? » Cette question atroce, odieuse, insupportable a été posée en public par une sénatrice LR à propos des jeunes révoltés interpellés. Bruno Retailleau, sénateur LR, a osé dire mercredi dernier : « Certes, ce sont des Français mais ce sont des Français par leur identité. Et, malheureusement, pour la deuxième, la troisième génération, il y a comme une sorte de régression vers les origines ethniques ».[2]
« Ce sont des Français MAIS … » Ce Mais, c’est le retour du refoulé raciste colonial. Ce racisme structurel, systémique, qui – au-delà des attitudes individuelles – imprègne encore les piliers et les murs de nos institutions, de notre Etat, de notre Police. Ce racisme qui assigne certains Français comme Nahel aux origines de leurs ascendants, mêmes lointains.
Ce racisme a pour conséquence le traitement policier des quartiers QPV,
autant que le traitement sécuritaire et policier de l’immigration.
Il en est ainsi de la gestion des frontières où se déroulent de trop nombreuses violences policières. Ce sont les refoulements illégaux d’étrangers aux frontières, par des policiers. Ce sont les migrants qui meurent dans la Bidassoa ou sur les rails du Pays basque pour échapper à la Police.
C’est Calais, avec les forces de l’ordre qui délogent les migrants de leurs camps de fortune, qui volent et détruisent leurs tentes et leurs maigres bagages, qui opèrent de véritables chasses à l’homme[3]. Sur les ordres des ministres de l’Intérieur.
Le CRDE Solidarité Migrants Pau Béarn et ses associations membres (CIMADE, AMNESTY, HUMASOL 64, etc. ) soutiennent les revendications de l’appel d’aujourd’hui « Deuil et Colère ».
- Nous appelons à en finir avec le racisme systémique qui gangrène encore l’Etat policier et ses institutions.
- Nous dénonçons la corrélation stigmatisante faite entre immigration et délinquance.
- Nous voulons une réforme en profondeur de l’institution policière et ses missions aux frontières
- Nous réclamons une politique d’accueil et d’intégration ample et ouverte fondée sur le principe constitutionnel de fraternité.
Le Collectif pour le Respect des Droits des Etrangers – Solidarité Migrants Pau Béarn
[1] Le Monde – 6 juillet 2023 https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/06/a-angouleme-la-mort-d-un-guineen-lors-d-un-controle-de-police-suscite-des-interrogations_6180780_3224.html
[2] Le Monde – 6 juillet 2023 https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-la-droite-s-aventure-sur-le-terrain-identitaire-au-risque-de-la-derive_6180880_823448.html
[3] Louis Witter : La Battue – (éd. du Seuil – 2023)