Bientôt les élections européennes …

Bientôt les élections européennes.

Il est possible que les questions des politiques migratoires soient un enjeu important de débats, et des votes.

Le pacte migratoire européen

Le « Nouveau Pacte sur la migration et l’asile » est une proposition de la Commission européenne présentée en septembre 2020 et discutée depuis cette date au sein de l’Union Européenne (UE), pour réformer les règles communes entre les États membres dans les domaines de l’asile et l’immigration.

Il consiste en cinq propositions législatives et quatre recommandations destinées à se substituer à une partie de ces règles communes pour, selon la Commission, mettre en place « un système permettant à la fois de maîtriser et de normaliser la migration à long terme, tout en étant pleinement ancré dans les valeurs européennes et le droit international ». (Toujours le fameux slogan : « Fermeté et Humanité » !!! dont on sait ce qu’il vaut)

Fondé sur le postulat (faux !) que l’UE est menacée par la pression migratoire, il vise en réalité à ressouder les États membres, particulièrement divisés depuis la mal nommée « crise migratoire » de 2015, autour d’un objectif commun : mieux résister « aux situations de crise et de force majeure » liées « à un grand nombre d’arrivées irrégulières ». Pour ce faire, le Pacte ne propose rien de « nouveau », il s’inscrit au contraire dans la continuité des politiques antérieures : parmi les mesures proposées, il privilégie

  • la dissuasion en amont des arrivées irrégulières de personnes étrangères en Europe,
  • des procédures renforcées de contrôle et de tri aux frontières en vue d’en expulser le plus grand nombre,
  • la répartition autoritaire de celles qui seraient reconnues comme éligibles à l’asile au sein des États membres volontaires, les autres pouvant s’affranchir de cette obligation à travers un mécanisme complexe de compensation financière.

Loin de proposer le « programme équilibré et humain » que promet la Commission européenne, le Pacte, en intensifiant la logique du tri, de l’enfermement et de l’exclusion, traduit l’obstination de l’UE à faire prévaloir la protection de ses frontières sur la protection des exilé⋅es, au mépris de leurs droits fondamentaux.

L’adoption définitive de l’ensemble des mesures devrait avoir lieu d’ici avril 2024.

L’Allemagne et l’Angleterre, guère mieux que la France actuellement

Au Royaume-Uni, la chambre des Lords a infligé un nouveau revers au projet de loi visant à expulser les réfugiés au Rwanda. Elle a notamment voté pour exiger que le texte respecte intégralement le droit national et international.

Ce nouveau camouflet permet de retarder davantage le décollage d’éventuels vols vers le Rwanda, que le gouvernement de Rishi Sunak espérait pourtant débuter “dès le printemps” de cette année.

Ping-Pong aux enjeux terribles entre les parlementaires et l’exécutif. Le gouvernement de Rishi Sunak veut toujours : « décourager l’immigration par des voies dangereuses et illégales. ». Mais toujours sans ouvrir des voies sûres de migration, et toujours en déléguant un rôle policier à la France, externalisant la frontière à Calais, contribuant ainsi à créer les camps terribles que nous connaissons sur les rives de la Manche.[1] Cette politique d’externalisation (vers la France, vers le Rwanda) est une stupidité fondée sur la croyance qu’il serait possible de maitriser les flux migratoires (qui sont un phénomène naturel), et sur la superstition du pouvoir de l’argent, versé à ces pays en contrepartie de quelque chose d’impossible.

L’Allemagne, en ce moment, ne vaut guère mieux que la Grand Bretagne. Nos amis d’outre-Rhin se sont dotés d’une “loi sur l’amélioration du rapatriement”, entrée en vigueur fin février, doit permettre de simplifier et d’accélérer les expulsions. Rien que le titre fait envie !

Berlin a également signé de nouveaux accords avec une série de pays d’origine pour simplifier les retours de migrants déboutés du droit d’asile, et par conséquence de rendre l’Allemagne moins attractive (!)[2]

Comme en France, la montée des opinions d’extrême- droite se trouve en contradiction flagrante avec le grand besoin de main d’œuvre étrangère qualifiée.

Nous pouvons continuer à nous inquiéter : nos pays européens marchent sur la tête

La Manche et la Méditerranée : toujours des lieux abandonnés et dangereux

Bien évidemment, ces lois et projets de pactes n’arrêtent en rien les traversées périlleuses des mers et des déserts. Ainsi cette semaine, dans la nuit de mardi 19 à mercredi 20 mars , ce sont 113 personnes qui ont été secourues dans la Manche par le CROSS[3] Gris-Nez.

Félicitons les secours. Mais n’oublions pas les morts : Au début du mois de mars, une fillette de sept ans est décédée après le naufrage de son embarcation dans le canal de l’Aa, à l’embouchure de la mer du Nord. En tout, déjà dix migrants sont morts en 2024 en tentant de rallier le Royaume-Uni via la Manche.

La police nationale du Pas-de-Calais bloque régulièrement les départs de migrants depuis la côte d’Opale. Derniers exemples en date, ce jeudi matin : les forces de l’ordre signalent avoir mis en échec le départ d’un bateau de 50 exilés au Touquet, et de quatre autres embarcations à Wimereux.

Mais cela n’empêche pas les arrivées sur les côtes anglaises, au prix d’autres dangers. De l’autre côté de la Manche, huit embarcations de migrants ont atteint les côtes britanniques mercredi, transportant au total 450 exilés. Un nouveau record d’arrivées en une seule journée, soulignent les médias britanniques. Parmi ces 450 arrivées, un exilé blessé par arme blanche a été secouru puis transféré à un hôpital après avoir débarqué au port de Douvres.[4]

L’illusion de la « solution » du retour des migrants dans leurs pays

Combien de fois ne nous a-t-on pas demandé à nous autres, militants et bénévoles, si la « solution » ne serait pas de les aider à rentrer au pays ?

Bien sûr il y a en France, l’aide de l’OFII au retour volontaire. Elle n’est pas négligeable, mais est très peu choisie par les exilés. Retourner « au pays » n’est pas une chose facile.  Cet article de Info-Migrants fait le point sur le dispositif mis en place en Côte ‘Ivoire par le gouvernement de Alassane Ouattara, à cet effet. Et la situation décrite est loin d’être idyllique.

Pour inciter ses ressortissants à rentrer au pays, les autorités ont, il n’empêche, lancé divers programmes d’aide à la réinsertion économique et sociale, en partenariat avec l’OIM. En 2023, plus de 1 700 Ivoiriens – poussés notamment par les attaques anti-Noirs en Tunisie – sont revenus chez eux, un record depuis 2013. Et près de 800 ont demandé l’aide proposée par l’État.

Mais beaucoup attendent encore de toucher ces sommes d’argent. Abdoul Rahman, rentré de Tunisie l’année dernière, travaille dans la boutique de son frère en attendant de monter son propre commerce. “Moi j’ai un projet, donc j’attends le financement, témoigne-t-il au micro de TV5 Monde. Mais si à chaque fois on me dit : ‘Dans 9 mois’, je vais recevoir [cet argent] quand ?”.

Pour pallier les carences de l’État, des ONG tentent d’aider les migrants, souvent traumatisés par un passage en Libye ou une traversée périlleuse de la Méditerranée. L’Association pour la réinsertion des migrants de retour en Côte d’Ivoire (Arm-ci), basée à Abidjan, aide par exemple les exilés à “réintégrer le tissu social”, avait assuré à InfoMigrants Boniface N’Groma, son fondateur. D’abord en leur permettant de gagner leur indépendance financière, car beaucoup de migrants de retour doivent rembourser des personnes qui leur ont prêté de l’argent pour leur voyage. Puis en leur apportant un soutien psychologique, indispensable à leur réinsertion.

“Une fois rentrés, par honte, beaucoup se cachent et ne préviennent pas leurs parents, avait confié Florentine Djiro, présidente du Réseau africain de lutte contre l’immigration clandestine (Realic). Le regard de la famille et de l’entourage sur eux est très dur. Dans certaines zones du pays, ces migrants de retour, on les appelle ‘les maudits’”.

Vincent Cabanel, avec Info-Migrants


[1] Rédigé à partir de cet article de Info-Migrants

[2] Rédigé à partir de cet article de Info-Migrants

[3] centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS)

[4] Rédigé à partir de cet article de Info-Migrants

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