Archives de catégorie : Uncategorized

Communiqué de presse du CRDE et de RESF

Mineurs Non-accompagnés (MNA) en recours Rencontre multipartite du 24 mars

Le CRDE Solidarité Migrants et le RESF (Réseau Education Sans Frontière), ont été conviés à participer, à la réunion qu’organise le président du Conseil départemental des Pyrénées Atlantiques, M. Jean-Jacques LASSERRE, sur la question de l’hébergement et de la scolarisation des Mineurs Non Accompagnés en attente d’une décision judiciaire sur leur minorité et leur isolement, ce jeudi 24 mars à 16 h 00 à l’hôtel du département.

Le président LASSERRE avait annoncé deux promesses lors de la session du jeudi 10 février 2022 :

  • prendre en charge leur (les MNA en recours) mise à l’abri durant la période hivernale.
  • réunir l’Etat, la Ville de Pau, et les parlementaires afin que puisse être apportée le plus rapidement possible une réponse claire à leur statut et à leur prise en charge jusqu’à ce que la décision de justice soit rendue.

La première promesse a été mise en œuvre sous la forme d’un hébergement à l’Eco Relais de Lons comportant la nuit et le petit déjeuner. 21 jeunes en moyenne ont bénéficié de ce dispositif depuis le 10 février. Aujourd’hui, sur les 21 jeunes, 4 ont de 14 à 15 ans, 6 vivent à la rue depuis plus de 10 mois.

En revanche les repas du midi et du soir n’étaient pas compris dans ce dispositif. Les jeunes ont pu bénéficier :

  • des repas du midi fournis du lundi au samedi par la Cuisine Communautaire de l’Agglomération de Pau.
  • des repas du soir du CCAS de la ville de Pau, du lundi au vendredi, et les maraudes des associations.
  • des repas du dimanche et des autres compléments fournis par les bénévoles d’Humanité Solidaire.

La seconde promesse va trouver sa réalisation avec la réunion convoquée par le président LASSERRE ce
jeudi 24 mars à 16 h 00 à l’hôtel du département.

Le CRDE est en attente de précisions sur les noms et qualités des participants à cette réunion multipartite, ainsi que sur le contenu et le déroulement de cette réunion. Nous ignorons encore si la Ville ou l’Agglomération, l’Etat, les parlementaires seront présents aux côtés du Département.

Nous ne savons pas non plus ce qui va se passer pour les 21 jeunes au-delà du 31 mars, qui arrive très vite.

Nous communiquerons à l’issue de cette réunion et vous convions à une CONFERENCE DE PRESSE le
Lundi matin 28 mars à 11 h 00 
dans les locaux de Médecins du Monde, 12 rue des Alliés, 64000 Pau

Le CRDE et le RESF se réjouissent de la prise de conscience que le Département a effectuée, ainsi que du dispositif actuel de mise à l’abri provisoire. Ils sont vigilants sur l’après-31 mars et demandent toujours une solution juste et pérenne pour ces adolescents. Le CRDE et le RESF maintiennent leur revendication : la solution la plus simple réside dans l’application immédiate de la recommandation n°15 du rapport du 3 février 2022 de la Défenseure des Droits (“Les MNA au regard du droit”) : “que le mineur bénéficie de la présomption de minorité jusqu’à décision judiciaire définitive le concernant”.  Pour plaider en faveur de l’inscription de cette solution dans la Loi, nous avons sollicité les parlementaires du département. A ce jour, M. Vincent BRU et Mme Josy POUEYTO ont accepté de nous rencontrer. Nous espérons d’autres réponses.

Associations et groupes signataires (CRDE et RESF)

ACAT ; Amnesty International groupe Pau-Béarn ; Bienvenue 64 ; CCFD – Terre Solidaire ; CNT ; FIA – ISM ;
FSU ; Haut Béarn Solidaire ; Humanité Solidaire 64 ; La CIMADE ; Ligue des Droits de l’Homme ;
 Médecins du Monde ; MRAP ; Piémont Oloronais Urgence Réfugiés ;
Pastorale des Migrants ; Secours Catholique Caritas France ; Solidarité Exil ; SE-UNSA 

La directive UE Protection Temporaire pour les réfugiés Ukrainiens

L’UE a activé pour la première fois une directive européenne de 2001 permettant très rapidement d’accueillir dignement des réfugiés avec un certain nombre de droits ouverts sans délai. Le député européen Damien Carême explique ici clairement (le 8 mars) que cette directive aurait pu être mise en oeuvre pour les réfugiés syriens en 2015 et tout récemment pour les réfugiés afghans après la chute de Kaboul le 15 août 2021.

Il ne doit pas y avoir “deux poids et deux mesures” dans l’accueil des exilés qui arrivent en Europe (et en France)

Pas de tri des réfugiés venant d’Ukraine !

Communiqué de presse – 2 mars 2022

La guerre odieuse que la Russie a déclenchée contre l’Ukraine le 24 février 2022 a déjà causé à ce jour le déplacement de près de 1 million de personnes. De très nombreux résidents ukrainiens se sont exilés ou sont en train de chercher à le faire. Nul ne sait pour combien de temps ces personnes vont ainsi se retrouver à chercher refuge et protection dans les pays de l’Union européenne. De nombreux pays de l’Union, dont la France, ont déjà exprimé leur intention d’ouvrir leurs portes à ces personnes déplacées, et de nombreuses initiatives de solidarité privée émergent un peu partout dans les sociétés civiles.

Or, à côté de ces réactions ouvertes et humaines, alors que ces événements tragiques se produisent et se poursuivent, certains faits et réactions nous alarment et notre collectif souhaite réaffirmer certains principes.

Le fait le plus choquant et contre lequel notre collectif proteste avec vigueur concerne le tri opéré à la frontière ukraino-polonaise entre « bons » réfugiés et réfugiés « indésirables ». De nombreux témoignages de confiance, venant de sources diverses, font état du blocage à l’entrée de personnes discriminées sur la couleur de leur peau. Il s’agit notamment d’étudiants africains ou de personnes déjà immigrées en Ukraine et qui cherchent à fuir les combats. Des personnes seraient ainsi systématiquement repoussées en fonction de leurs origines. Si de tels faits étaient avérés et confirmés, ils constitueraient des comportements et des actions racistes, un scandale et une honte, eu égard aux principes et valeurs qui sont ceux de l’Union européenne.

A côté de ces comportements aux frontières, notre collectif souhaite aussi alerter et rester vigilant sur certaines expressions entendues ces derniers jours qui ne sont pas, telles quelles, acceptables :

  • Ainsi un député, président de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale, a évoqué vendredi 25 la « vague migratoire » qui se prépare en Europe après cette invasion de l’Ukraine par la Russie, tout en ajoutant, comme pour rassurer son auditoire, que « ce sera sans doute une immigration de grande qualité »
  • Un éditorialiste renommé a souligné que « le geste humanitaire est évident, … (d’autant) que ce sont des européens de culture (…) qui ne vont pas passer dans une logique d’immigration »
  • D’autres journalistes ont eu des expressions d’une maladresse égale : « on ne parle pas de syriens, … on parle d’européens …. », « ce n’est pas une endroit, avec tout le respect que je vous dois, comme l’Irak ou l’Afghanistan (…) c’est une ville relativement civilisée »

Hiérarchiser les exilés, les « qualités » d’immigration, les situations des pays en guerre sur des critères de plus ou moins grande « civilisation » est au minimum très maladroit. Plusieurs de ces intervenants en ont eu conscience et ont ensuite présentés des excuses ou des correctifs.

Sans vouloir stigmatiser quiconque, le CRDE veut rappeler que toutes les femmes et les hommes sont égaux au regard des droits humains, que nos pays n’ont pas à faire de tri entre personnes déplacées ou exilées sur quelque critère que ce soit.

L’accueil des réfugié.e.s est un principe fondamental du droit international qui n’est pas à géométrie variable et certainement pas une question de culture, de religion, ni d’opportunité économique.

Signé : Le CRDE

Un reportage sur le sujet : sur InfoMigrants.net

 Etranger∙e∙s en prison : surveiller, punir, expulser

Aujourd’hui sort le rapport d’observation « Etranger∙e∙s en prison : surveiller, punir et expulser », qui constate, documente et analyse le vécu pénal et pénitentiaire des personnes qui passent par la case prison. C’est aussi l’occasion de mettre en lumière le traitement que les politiques migratoires imposent aux personnes étrangères, et à l’institution carcérale dans son ensemble, à partir des constats opérés par les équipes de La Cimade qui interviennent en prison.

Près de dix ans après le premier rapport paru en 2014, ce sont ainsi 70 pagesd’analyses, de témoignages écrits de personnes détenues, d’infographies et de chiffres inédits fournis par le ministère de la Justice qui sont désormais disponibles.

Le rapport est illustré de photographes prises directement depuis les établissements pénitentiaires, grâce à un partenariat noué avec le photographe du Contrôle Général des Lieux de Privation de Liberté, Jean-Christophe Hanché.

Il s’ouvre par une contribution de Jean-Marie Delarue, ancien et premier Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté, et qui a bien voulu prêter sa plume aux constats et revendications de notre association.

Que contient le rapport ?

Depuis 1946, dans le cadre des permanences juridiques que tiennent 170 bénévoles dans 75 prisons de France et d’Outre-mer, La Cimade accompagne les personnes étrangères empêchées, et qui en plus font les frais d’un système qui au mieux les oublie, au pire les exclue.

Dans le cadre de ce rapport, La Cimade suit le parcours type d’une personne étrangère. Chaque chapitre se concentre sur une « étape » du parcours pénal des personnes étrangères :

  • La première partie évoque ainsi le traitement judiciaire dont elles sont l’objet ;
  • La deuxième partie s’arrête sur les conditions de détention et sur l’accès au droit ;
  • La troisième partie revient sur la sortie de prison, afin d’appréhender la sortie libre, les aménagements de peine, et la rétention administrative.

Le corps du rapport est précédé d’une partie volontairement graphique mettant en lumière les statistiques et préjugés dont sont victimes les personnes étrangères détenues. Il se termine par les revendications et propositions de La Cimade relatives à la prison des personnes étrangères.

Quels sont les constats portés par l’association ?

La Cimade constate, principalement :

  • Que la double peine n’a jamais été abolie. Contrairement à ce qu’on peut trop souvent entendre, la France n’est pas laxiste.
  • Que les personnes étrangères n’ont le plus souvent pas accès à leurs droits en prison. Les pouvoirs publics ne sont pas capables de réglementer l’accès à l’asile des personnes détenues, alors qu’ils le peuvent dès qu’il s’agit d’expulser ces mêmes personnes ;
  • Que la prison agit de plus en plus comme un outil mis au service de politiques migratoires répressives. Le sens de la peine s’efface au profit d’une politique migratoire essentiellement policière.

Quelles sont les revendications face à ces constats ?

  • La Cimade appelle les différentes figures publiques à cesser amalgames et mensonges, et arrêter de corroborer le lien entre immigration et délinquance, qui n’a jamais existé
  • La Cimade demande l’égalité réelle des droits entre toutes et tous, et la fin de toutes les mesures de double peine
  • La Cimade demande non seulement que des textes contraignants soient pris, mais encore et surtout que des moyens soient mis afin de lutter contre les discriminations dont les personnes étrangères détenues sont victimes.

Comment se le procurer ?

Le rapport est téléchargeable sur le site et est disponible en version papier pour la somme de 5 euros.

Webinaire sur ce thème et ce rapport : Jeudi 3 mars à 19 h 00 s’inscrire  ICI. 

La CIMADE

Le service public doit être plus humain !

Communiqué de presse 

300 organisations (dont le CRDE Solidarité Migrants) signent un Manifeste pour un service public plus humain et ouvert à ses administréEs

La dématérialisation des démarches administratives, si elle peut les simplifier pour de nombreuses personnes, peut aussi être une source majeure d’entrave à l’accès aux droits pour d’autres : nos 300 organisations agissant en solidarité avec les personnes, françaises ou étrangères, en situation de précarité, co-signataires duManifeste pour un service public plus humain et ouvert à ses administréEs, dénoncent cette dérive.  

La fermeture de trop nombreuses administrations pendant le confinement du printemps 2020 a amplifié ce phénomène, sans considération sérieuse de l’impact pour les personnes précaires. L’administration s’éloigne ainsi du public et plus particulièrement de celles et ceux qui en ont le plus besoin : défaut d’alternative physique, absence de dialogue, insuffisance des dispositifs d’accompagnement et de conseil, interface web complexe ou incomplète, absence de recours dès lors que les démarches en ligne ne peuvent aboutir, souvent en raison de l’insuffisance de moyens humains et de leurs choix d’affectation, comme le montrent par exemple les modalités d’accès aux services « étrangers » des préfectures ou aux caisses de protection maladie ou d’allocations familiales.

Pour les administrations, la dématérialisation des démarches représente l’opportunité de faire disparaître les files d’attente et de limiter la présence du public dans leurs locaux. Mais l’attente est en réalité rendue invisible et aucun indicateur ne permet aujourd’hui de mesurer sa durée et l’ampleur des personnes touchées.

Le développement du numérique se substitue à l’accueil physique, alors qu’il nécessite lui-même un accompagnement humain. Les personnes précaires se tournent donc souvent pour réaliser leurs démarches en ligne vers les associations, syndicats, collectivités territoriales, centres sociaux, voire les employéEs de médiathèque, qui les accompagnent en plus de leurs missions initiales. Mais la démission du service public exclut toujours un peu plus du droit commun une frange de la population et porte atteinte au principe d’égalité d’accès au service public, ainsi qu’à sa gratuité et à sa continuité. 

Nos organisations appellent les pouvoirs publics à remettre ces principes au cœur de l’organisation des administrations. L’accueil physique ne saurait être réservé à celles et ceux ayant réussi à franchir le mur numérique. Nous exigeons un service public humain et ouvert à ses administréEs, qui fonctionne pour toutes et tous et ne sacrifie personne !

Communiqué de presse Jeudi 10 février 2022

Le CRDE salue les annonces faites ce jeudi 10 février par le président Lasserre et reconnaît que le Conseil départemental des Pyrénées Atlantiques a fait un pas dans la bonne direction sur le sujet des MNA (Mineurs Non Accompagnés) en recours.

Le président Lasserre dans son discours d’ouverture de la session du Conseil départemental a acté ce jeudi 10 févier qu’il y avait un problème au sujet des MNA (Mineurs Etrangers Isolés, non accompagnés) en recours devant la Justice.

Ces jeunes ont vu leur minorité niée par le département et ils ont introduit un recours devant le Juge des Enfants.

Le président Lasserre a annoncé ce matin dans la session du jeudi 10 février deux promesses :

  • prendre en charge leur (les MNA en recours) mise à l’abri durant la période hivernale.
  • réunir l’Etat, la Ville de Pau, et les parlementaires afin que puisse être apportée le plus rapidement possible une réponse claire à leur statut et à leur prise en charge jusqu’à ce que la décision de justice soit rendue.

Le CRDE salue et applaudit à la deuxième résolution. Seule une concertation entre les protagonistes de cette affaire permettra de trouver une solution

Cependant, au vu des modalités de mise en œuvre de la première annonce (reçues vers 19 h 30 ce jeudi soir), le CRDE exprime les plus vives réserves :

  • Il s’agit en fait d’un hébergement d’urgence par le 115 un peu amélioré (rien sur les repas du midi, sur les repas du WE, la stabilité alimentaire).
  • Plusieurs sont malades. Les médecins de la PASS et de Médecins du Monde leur disent qu’il faudrait avoir une alimentation équilibrée et riche en légumes. Cela ne sera pas possible dans ce « 115 amélioré ».
  • La scolarisation de ces mineurs est toujours dans l’impasse.
  • Nous disons donc que le Département, même s’il paye à l’Etat la facture, n’assume pas encore complètement ses responsabilités.

Le CRDE continuera son combat pour une solution juste et pérenne pour ces adolescents. Le CRDE maintient sa revendication : La solution la plus simple réside selon nous dans l’application immédiate de la recommandation n°15 du rapport du 3 février 2022 de la Défenseure des Droits (“Les MNA au regard du droit”) : “que le mineur bénéficie de la présomption de minorité jusqu’à décision judiciaire définitive le concernant”.

Succès pour notre manifestation du 9 février “Mettez à l’abri les MNA en recours”

Notre manifestation a réuni 120 personnes, dans une ambiance joyeuse et chantante, sous un soleil généreux.

De belles retombées dans la presse locale, avant et après notre manifestation.

Soutien aux mineurs isolés : reportage de Sud-Ouest

L’association Humanité Solidaire 64 est membre du CRDE. Avec la CIMADE, Médecins du Monde (également membres du CRDE) et RESF, un groupe de coordination permet d’articuler les différents niveaux de soutien concret et direct à ces mineurs isolés étrangers (mineurs non-accompagnés = M.N.A.).

Le CRDE et RESF mènent depsui deux mois une action structurée visant à ce que ces mineurs isolés en recours, à la rue, soient mis à l’abri et scolarisés. Notre action, en plusieurs étapes, s’adresse au Conseil départemental du 64, à la Mairie de Pau, aux représentants de l’Etat sur le territoire (DDETS et préfecture), ainsi qu’à l’Inspection Académique et au Rectorat (Education Nationale).

Notre rpochaine étape est la manifestation du 9 février 2022

Informatique à Oloron pour les demandeurs d’asile

L’association P.O.U.R. (Piémont Oloronais Urgence Réfugiés) accompagne les demandeurs d’asile du CADA d’Oloron, géré par l’OGFA, et ceux de la structure de France Horizon, récemment ouverte. Vivre aujourd’hui en France sans accès au Web, sans un minimum de culture et d’outils “numériques” ? Pas possible. Forte de ce constat l’asso P.O.U.R. a entrepris de doter chaque logement de demandeur d’asile d’un ordinateur. Belle action, beau partenariat avec le Rotary, et bel article de La République des Pyrénées !

Un tipo strano – soirée cinéma au Méliès – Rencontre avec Samuel Gratacap (17 décembre)

Amadou est un type étrange, un tipo strano. Elena le lui dit alors qu’il est allongé près d’elle sur la plage, après la fête. Amadou se tait et ne dit rien. Il sourit beaucoup, mais il ne dit pas grand-chose. Il se lève, laissant Elena reposer et contemple la mer. Il avait approuvé d‘un hochement de tête quand Elena lui avait fait remarquer : « C’est beau ». mais maintenant il ne dit rien. C’est en lui, dans sa tête, que se bousculent d’autres images. Violentes. Des cris, des vagues, une caméra qui bouge beaucoup, un pneumatique vide, des affaires abandonnées, des vêtements qui flottent. Un naufrage ?

Les images documentaires que Samuel, le réalisateur, a glanées dans ses reportages en Lybie, sur l’Aquarius, au camp de Moria, à Lampedusa … sont insérées régulièrement dans la fiction et le fil du récit autour d’Amadou, le jeune gambien. Comme si elles venaient dire l’envers du sourire et de l’avancée d’Amadou ; Amadou est énergique, il travaille, il marche, il roule, il avance, il veut aller en France. Une force douce qui va. Comme dit Samuel : « il est embarqué et il embarque avec lui ». C’est pour ça que son ami boxeur et Elena le suivent. Que Elena le suit sur des sentiers improbables de montagne.

Sous son sourire juvénile, il y a ces souvenirs. Ces arrachements et traversées de l’inimaginable, de l’horreur peut-être. Il avance pourtant, il nous embarque comme il a embarqué Elena. Malgré ses cauchemars. Les jeunes MNA (Mineurs Non Accompagnés) que nous rencontrons ont aussi ces moments d’absence soudaine, de regards qui se perdent, qui se noient dans des détresses indicibles. Et souvent il n’y a rien à dire devant cette étrangeté soudaine, juste à l’accueillir silencieusement dans une fraternité muette.

La discussion avec Samuel, après la projection du film, a été passionnante. Samuel a tenté de nous faire un peu saisir combien son travail, ses reportages, ses photos, avaient déplacé de choses en lui. Et comment ce premier film était une tentative pour raconter une histoire qui lui tenait à cœur, mais que la forme « reportage » ne lui avait jamais permis de développer ainsi.

J’ai cru comprendre que c’est une façon aussi en donnant une autre vie à ces images documentaires qu’il avait tournées, en les enchâssant ainsi dans une fiction poétique et réaliste, très proche de trajectoires rencontrées ou possibles, de s’en délivrer, comme on cherche à se délivrer de mauvais rêves trop durs, qui pèsent sur nos journées, d’en déjouer le maléfice et de les retourner vers l’espérance d’un futur possible.

Le film de Samuel Gratacap nous a emmené vers beaucoup plus de questions que de réponses. C’était un très beau moment au cinéma Le Méliès à Pau, qui nous a généreusement accueillis, et une belle rencontre. Avec Amadou. Et avec Samuel. Un tipo strano, lui aussi.

C’était au Méliès, le vendredi 17 décembre en soirée, pour célébrer la Journée Internationale des Migrants 2021 (avec un peu d’avance)

Vincent Cabanel

Un tipo strano, film de Samuel Gratacap (45 mn), 2021, les films du Detroit

Photos ci-dessous : extraites du film “Un tipo strano”