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APPEL à une journée nationale de défense des jeunes exilé.e.s !

Mercredi 5 octobre 2022

Mercredi 5 octobre 2022, à l’appel d’UTOPIA 56 et dans le cadre de la Coordination Nationale « Jeunes Exilé-e-s en danger » se tiendra une journée nationale de défense des jeunes exilé.e.s !

Depuis plusieurs années, nous ne cessons de dénoncer le caractère irrationnel du fonctionnement des départements, juridictions pour mineur.e.s et des préfectures dans le traitement des dossiers des jeunes non accompagné.e.s, majeur.e.s ou mineur.e.s en recours.

Plus de 50 % des jeunes qui passent un entretien d’évaluation aux services MNA (Mineurs non Accompagnés) des départements et/ou métropoles et qui sont refusé.e.s disparaissent dans la nature, ils ont entre 14 et 17 ans !

A titre d’exemple, 90% des jeunes passant devant certains tribunaux pour enfants font l’objet de rejets des demandes de placement en assistance éducative !
Les Cours d’Appel ne font guère mieux, avec par endroits 99,9 % d’entre elles/eux qui se voient débouter de leur demande de reconnaissance de minorité.

Incompréhensible et irrationnel par rapport au 90 % de reconnaissance de minorité par les tribunaux pour enfants dans d’autres régions.

Non-respect de la mise à l’abri en attente d’évaluation, rejets systématiques des juridictions pour enfants aux demandes de mesures d’assistance éducatives, sorties sèches des lieux d’hébergement…

Les parcours divergent, mais les résultats restent les mêmes : à Paris, à Lyon, à Marseille, à Toulouse, des jeunes sont dans la rue, sous des tentes…

Une image contenant texte, extérieur, parapluie, accessoire

Description générée automatiquementPartout ailleurs, des rêves brisés, des jeunes stigmatisé.e.s, abandonné.e.s à leur sort…

Ce 5 octobre 2022, nous voulons dire STOP !
 STOP à la maltraitance,
 STOP aux incohérences,
 STOP à l’errance pour des centaines d’entre eux.
 STOP à la roulette russe selon qu’on soit à Nantes ou Montpellier…

Ce 5 octobre, soyez avec elles/eux, PARTOUT, pour faire entendre leurs voix.
Il en va de notre avenir commun, dans notre société.

Utopia 56  et Coordination Nationale « Jeunes Exilés en danger »

Annulation

La Tribune collective : “MINEURS EN DANGER “

Il s’appelle J.

Mai 21 

Il s’appelle J. Son grand frère l’a fait sortir de son pays. Il l’a confié à quelqu’un pour le pousser vers l’Europe. Avec une mission. Trouver de l’argent, des médicaments pour sa Maman. Elle est gravement malade et ne peut pas se soigner. Alors, la famille a fait partir le petit J. 

J a dit que l’aventure a été très longue. Il ne savait pas. Il n’a pas tout compris. Il parle français, mais mal, et d’une voix très faible, un murmure. Il garde son visage fermé, presque inexpressif. J est en mission pour sa maman. Personne ici ne parle sa langue maternelle, le wolof.

L’évaluation de J a conclu qu’il mentait, qu’il n’était pas mineur, qu’il avait dit d’autres choses en Espagne. J n’a pas compris ce que les évaluateurs lui ont dit. il a compris de travers pas mal de choses. Forcément, « ils » ne s’assurent pas de la réception de leurs dires.

J’ai demandé à J : “- Combien de fois as-tu vu Mme X. (l’inspectrice de l’ASE qui a signé l’arrêté de fin de mise à l’abri) ?” Il me dit : “-Je ne l’ai jamais vue – Mais c’est elle qui a signé le papier. – C’était par ordinateur.”   

“Par ordinateur”. L’entretien final, celui qui décide de tout, s’est déroulé en visio-conférence, sans interprète en wolof, parce que l’inspectrice était en télétravail. C’est sûr que c’est génial de se faire un avis éclairé sur quelqu’un par visio-conférence….  

J continue de nous regarder avec son beau regard impénétrable. Il est en mission pour sauver sa maman. Il attend. Il nous fait un peu confiance. Un peu. Il vient aux cours de français, aux rendez-vous médicaux. Il appelle pour dire qu’il a faim. Ou quand le 115 n’a pas de place.

J un jour a rencontré chez un bénévole un carreleur. Qui lui a montré le métier et s’est pris d’affection pour J. Il voulait lui faire faire un stage, et pourquoi pas un contrat d’apprentissage.

Mais J n’a pas de carte de séjour, et puis il est mineur, (enfin pas pour le département). Alors le projet de stage qui avait mis le sourire sur les lèvres de J est tombé à l’eau. Et J est reparti, impénétrable, attendre dans les allées du parc Lawrence…

Les puissants et les petits chefs qui tiennent fermées les portes n’ont pas de honte, pas de vergogne, à laisser ainsi à l’abandon ces jeunes êtres humains, nos semblables, nos frères.  

Juin 2021

La journée commence par accompagner J , à l’unité médico-légale pour examen de sa minorité. (Test osseux).

Entretien avec le médecin. En toute illégalité celui-ci montre à P. une série de photos de pénis pour lui demander lequel ressemble le plus au sien.

C’est interdit par le 4e alinea de l’article 388 du code civil : “En cas de doute sur la minorité de l’intéressé, il ne peut être procédé à une évaluation de son âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires.”

Son avocate lui avait dit de ne pas répondre. Mais J obéit à l’autorité du moment et le médecin était à ses yeux une autorité.

L’expertise médico-légale conclura par un doute, comme souvent, une fourchette d’âge compatible avec les dires de J sur sa minorité.

Août 2021 

J est reconnu mineur par le Juge des Enfants, qui a statué en sa faveur.

5 mois à la rue…  pour rien.

Et il est repris par l’ASE, qui n’avait pas voulu l’accueillir. J est maintenant à l’école. Il a remercié chaque bénévole des associations qui l’avaient aidé pendant cette période.

Quand J a été mis à la rue, la première période de mise à l’abri avait été trop courte pour avoir le temps d’emmener J à la PASS (permanence d’accès aux soins) comme il est de règle : aucun vaccin n’avait été fait, aucun dépistage de la tuberculose, aucun examen de son état de santé. Ce sont les bénévoles de Médecins du Monde et de Humanité Solidaire 64 qui s’en sont préoccupé. Et le personnel de la PASS, soignants et administratifs. J’en profite pour les remercier et saluer leur travail remarquable, leur accueil toujours génial.

Vincent Cabanel