Archives de catégorie : MNA

Refoulement illégal des mineurs isolés à Menton

La Convention internationale des Droits de l’Enfant, dont la France est signataire, interdit aux Etats de refouler à leurs frontières ou d’expulser de leur territoire les mineurs étrangers isolés : ces jeunes sont des enfants AVANT d’être des étrangers.

La France a des pratiques illégales, contraires au droit international, contraire à ses engagements : notamment à la frontière italienne, comme le signale le communiqué inter-associatif ci-après.

Mais l’opération Wuambushu que le ministre Darmanin diligente à Mayotte va produire également l’expulsion illégale de très nombreux mineurs isolés.


LES MINEURS ISOLÉS DOIVENT ÊTRE PROTÉGÉS, PAS REFOULÉS !

21 avril 2023

Communiqué de presse inter-associatif

Depuis le 17 avril, l’Anafé, Médecins du Monde, Amnesty International France, La Cimade et Médecins sans Frontières suivent avec attention la situation à la frontière franco-italienne entre Vintimille et Menton, et notamment en ce qui concerne la protection des mineurs isolés.

Au moins une cinquantaine d’entre eux ont rejoint un gymnase à Menton en fin de matinée le 19 avril dans l’attente d’une prise en charge par le département. Avant d’y être transférés, ces mineurs avaient été enfermés (de quelques heures à 2 jours) dans des locaux privatifs de liberté attenants au poste de la police aux frontières de Menton pont Saint-Louis. Cet enfermement est contraire à la Convention internationale des droits de l’enfant. Nous avons été informés qu’au moins 5 mineurs ont été refoulés vers l’Italie jeudi matin en toute illégalité car ils auraient dû être protégés par l’Aide sociale à l’enfance. Nos associations demandent aux autorités de respecter la Convention internationale des droits de l’enfant, dont la France est signataire, et d’appliquer les procédures prévues dans l’accueil provisoire d’urgence.

Les mineurs isolés doivent être admis systématiquement et sans délai sur le territoire français. Les autorités compétentes à la frontière doivent donc prendre toutes les mesures et garanties spécifiques pour assurer l’effectivité de leurs droits, leur protection, en particulier la conduite d’un entretien individuel, la notification des droits dans une langue comprise par l’enfant, la désignation sans délai d’un administrateur ad hoc et la possibilité de formuler une demande d’asile.

Nous rappelons que ces mineurs sont des enfants en danger qu’il faut protéger.

Signataires : Amnesty International France, Anafé, La Cimade, Médecins du Monde, Médecins sans frontières

Tous les jours, des dizaines de personnes exilées sont interpellées, privées illégalement de liberté et refoulées à Menton. Parmi elles se trouvent des mineurs isolés, mais également des familles et des demandeurs d’asile. Nos organisations dénoncent des procédures expéditives, qui ne respectent pas les droits de ces personnes, notamment le droit de demander l’asile, d’avoir accès à un interprète, à un avocat et à un médecin. Ces personnes sont enfermées avant d’être refoulées sans examen de leurs situations individuelles – ce qui est illégal. D’après les chiffres transmis par les autorités, 30 146 personnes ont ainsi été refoulées à Menton pont Saint-Louis suite à un refus d’entrée en 2021, parmi lesquelles 1 108 mineurs isolés.

voir aussi cet article de Politis (2018) sur la situation à Menton, à la frontière (la photo de tête est extraite de cet article)

Le sort des mineurs étrangers isolés en France : hypocrisie et absurdité.

Une hirondelle ne fait pas le printemps. Mais c’est un petit signe.

En est-il de même de cette tribune de Jean Arthuis dans Ouest france, ce 12 sept. 2022, (cf. c-dessous en PDF) qui est encourageante pour nos combats.

Jean Arthuis est un monsieur sérieux. Sénateur, ministre, grand argentier, membre et président de multiples instances…. Sa carrière politique de centriste, passé par le Modem, désormais membre de LREM, en fait quelqu’un qui peut avoir l’oreille du prince.

Sa tribune n’est pas un plaidoyer humaniste, c’est une tribune d’homme politique habitué à exercer de hautes responsabilités, pragmatique et voulant être lucide.

Jean Arthuis regarde la réalité en face. Que dit cette réalité ?

Depuis la grève de la faim de Stéphane Ravacley, boulanger de Besançon, en faveur du titre de séjour de son apprenti Laye Traoré, victime d’une OQTF (janvier 2021), de trop nombreuses affaires similaires ont éclaté un peu partout dans l’hexagone. (cf. en fin de page une liste de noms et de lieux avec les liens ad hoc et ici un article du Monde en janvier 2021)

A chaque fois, c’est presque toujours le même scénario : une OQTF pour une raison ou une autre, une mobilisation citoyenne autour du jeune, et parfois après un long combat, le fléchissement du préfet qui finit par accorder le titre de séjour.

Déjà l’an dernier 453 élus avaient signé une tribune le 31 octobre 2021. Le CRDE la relayait sur notre site.

Ces jeunes ne repartiront pas : c’est ce que dit clairement Jean Arthuis. Et il a raison. Inutile de rêver à des politiques de fermeture ou de contrôle plus strict des frontières, inutile de proclamer à l’instar la plupart des ministres de l’intérieur que l’on va augmenter le taux d’exécution des OQTF (Obligation de Quitter le Territoire Français), …

Jean Arthuis fait également justice de la fumeuse rhétorique de l’appel d’air (que les représentants du CRDE ont pourtant encore entendue récemment dans la bouche de responsables de l’administration départementale …). « L’appel d’air a déjà eu lieu du fait de nos législations sociales » que personne ne souhaite réduire (pas M. Arthuis en tout cas dans sa tribune).

La CIMADE

La politique actuelle alimente donc « la fabrique des sans-papiers » pour reprendre une expression de la CIMADE : « Et comme ils n’ont ni les moyens ni l’intention de repartir chez eux, ils se déclarent sans illusions demandeurs d’asile, voués à l’économie parallèle, aux trafics sordides, voire à la délinquance. »

L’hypocrisie des services de l’Etat est à son comble quand une directrice départementale conseille elle-même aux responsables associatifs que nous sommes d’encourager ces jeunes à déposer une demande d’asile, dont elle sait qu’elle est n’a aucune vocation à prospérer, pour pouvoir bénéficier pendant un temps des CMA (Conditions Minimales d’Accueil, destinées aux demandeurs d’asile) … L’Etat encourage à tricher, à utiliser pour autre chose la procédure d’asile, pour pouvoir continuer à faire l’autruche, la tête dans le sable.

La réalité dit aussi que ces jeunes peuvent et veulent s’intégrer, qu’ils peuvent et veulent se former, travailler, qu’ils entrent dans des réseaux de sociabilité où ils se font apprécier, que des citoyens veulent avec force qu’ils restent en France parce qu’ils sont devenus des amis et se mobilisent avec énergie pour eux, que des patrons, des artisans ont besoin d’eux, qu’il y a des places à pourvoir qui sans eux ne seront pas pourvues :

« Partout en France, des postes sont à pourvoir. Autoriser avec discernement les jeunes étrangers dont les parcours d’intégration sont exemplaires et les perspectives d’insertion réelles est un devoir. »

Bien sûr, Jean Arthuis, en bon centriste, nuance ce « devoir » en le pondérant par le « discernement » de l’autorité et « l’exemplarité » du jeune étranger. (on en demande toujours plus aux étrangers qu’aux natifs du pays …) Mais bon ! prenons cette avancée avec satisfaction.

Jean Arthuis va dans le bon sens en tirant cette conclusion logique devant un tel constat.

« Dès lors que ces jeunes ont atteint leur majorité, qu’ils n’ont aucune intention de rentrer chez eux et que nous n’avons pas la volonté, ni les moyens, de les expulser, notre devoir est de leur délivrer un titre de séjour. »

Il faut nuancer pourtant certaines assertions de Jean Arthuis ; Quand il écrit que l’autorité judiciaire est (sous-entendu : toujours) « respectueuse de la présomption de minorité », il se trompe lourdement et c’est là que le bât blesse. Ni les évaluations sociales de l’ASE, ni les évaluations documentaires de la PAF, ni les soi-disant « expertises médico-légales », ni les décisions des juges, ne sont exemptes de reproches, de biais multiples … Et ce quel que soit le département. Les militants qui connaissent bien ces dossiers ont trop souvent le sentiment de loteries injustes.

Par ailleurs, Jean Arthuis a raison de « s’interroger sur les rôles respectifs des départements et de l’État en matière d’accueil et de prise en charge des mineurs étrangers », mais il ne va pas assez loin dans cette réflexion qui mérite d’être approfondie.

De même, il est permis de ne pas le suivre quand il laisse finalement au préfet (représentant de l’Etat) le rôle ultime de décideur en l’’inviter à user de son pouvoir discrétionnaire. Bien sûr, il souhaite pour y inciter les préfets – qui ne sont pas tous dans cet état d’esprit d’accueil – qu’un « signal du gouvernement en ce sens » soit donné.

C’est nécessaire, est-ce suffisant ? On peut penser que non et qu’il serait utile de remettre sur le métier une proposition de loi que le sénateur Jérôme Durain avait introduite en mars 2021 (proposition visant l’intégration des jeunes majeurs étrangers et baptisée « loi Ravacley), mais qui avait été bloquée par la majorité sénatoriale LR.

Je conclue en laissant la parole à un de ces jeunes, qui exprime bien leur ressenti commun :

« Je ne comprends pas, répète Ousmane. On nous aide au départ et ensuite plus rien. C’est comme si on nous faisait monter en haut d’un arbre, et une fois qu’on y est, on le coupe. »

Vincent Cabanel

Une liste rapide de jeunes majeurs victimes d’une OQTF

Cliquez sur chaque nom pour accéder à la pétition ou à l’article sur le mouvement qui l’a soutenu

Adama va être régularisé !

Mise à jour de l’article mardi 21 juin 14:01 : nous venons d’apprendre par nos amis d’Etorkinekin que la préfecture du 64 a répondu ce matin en leur annonçant la décision d’accorder à Adama une carte de séjour de 1 an, l’autorisant à travailler. Adama va pouvoir reprendre le cours de sa vie normalement et sereinement. Nous nous réjouissons de cette décision.

La fédération Etorkinekin et plusieurs associations de Bayonne – Pays Basque viendront remettre mercredi 22 juin à 11 h au préfet des Pyrénées Atlantiques la pétition ci-accessible en ligne déjà signée par plus de 25 000 personnes.

Retrait de l’OQTF

Retrait de l’IRTF !

Régularisation d’Adama

à l’appel de ATTAC, Bizi Migrants, EELV, EHBai, Ensemble, ETORKINEKIN, Diakité, FSU, La Cimade, LAB, LFI (Bayonne – Pays Basque)

Les associations du CRDE – Solidarité Migrants (Pau-Béarn) seront également présentes et soutiennent la cause d‘Adama Soumahoro.

La situation de ce jeune est d’autant plus scandaleuse que ce gamin avait été reconnu mineur dans le Gers et que c’est la cellule MNA du département 64 qui a refait, motu proprio, une évaluation concluant à sa non-minorité. Le CRDE dénonce une fois de plus les graves dysfonctionnements de cette cellule MNA.

Vincent Cabanel

La pétition en faveur d’Adama

Le lien et le texte de la pétition :

https://www.change.org/p/r%C3%A9gularisation-d-adama

Adama Soumahoro, 20 ans, Ivoirien, est arrivé en France fin 2017. Il a été reconnu mineur dans le Gers mais, faute de places, il a été envoyé dans le département des Pyrénées Atlantiques qui a remis en cause sa minorité.

Dès avril 2018, il a été accueilli et accompagné par Etorkinekin, fédération d’associations du Pays Basque solidaire avec les migrant.e.s.

L’intégration d’Adama sur le territoire hexagonal est manifeste :

Il a fourni les efforts nécessaires pour que son intégration socio-professionnelle soit effective.

De 2018 à 2020, Adama a appris le métier de plâtrier-plaquiste au Lycée Cantau (Anglet) dont il a obtenu le C.A.P. Puis, après une année supplémentaire au même lycée, il a obtenu un C.A.P de peintre.

Il a effectué plusieurs stages chez des employeurs qui ont tous constaté son sérieux et sa volonté de réussir.

Le  6 août 2020, Adama a déposé une demande de titre de séjour et obtenu successivement deux récépissés l’autorisant à travailler jusqu’à fin juillet 2021 mais le préfet a finalement rejeté sa demande en septembre 2021.

Le 8 avril 2022, il a signé un CDI à temps partiel.

Adama a également participé à de nombreuses activités bénévoles, apportant son dynamisme et ses compétences. Dépourvu d’attaches personnelles et familiales dans son pays d’origine, il justifie en revanche  d’un solide réseau de relations sociales au Pays Basque où il vit depuis presque  5 ans.

Tout récemment, le 3 juin 2022, Adama a été interpellé par la police en sortant du CCAS (Centre Communal d’Action Sociale) de Bayonne.

Il a été placé en retenue administrative dans les locaux de la Police Aux Frontières (PAF) à Hendaye. 

Le même jour, le préfet des Pyrénées Atlantiques, sans avoir fait un examen réel et sérieux de la situation d’Adama, lui a notifié un arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai (OQTF), assorti d’une interdiction de retour (IRTF) d’un an et une décision fixant la Côte d’Ivoire comme pays de renvoi, puis a décidé d’une assignation à résidence chez son hébergeur avec obligation de pointage au commissariat deux fois par semaine. Adama se trouve ainsi sous la menace permanente d’être renvoyé, à tout moment, dans son pays.

Une scolarisation réussie, une bonne intégration socio-professionnelle, des liens personnels tissés sur le territoire français, une volonté très forte de s’installer et de vivre ici ne semblent pas suffire à ébranler l’intransigeance des autorités en matière d’accueil et d’insertion. C’est le cas pour Adama comme pour beaucoup d’autres qui ont suivi un  parcours similaire dans l’espoir d’obtenir un titre de séjour et à qui toute possibilité de régularisation est scandaleusement refusée.

Contre ce durcissement des conditions de régularisation, il nous faut nous mobiliser.

 Adama a besoin d’un très large soutien !

Demandons l’abandon des mesures d’OQTF et d’IRTF prise par le préfet des Pyrénées-Atlantiques à l’encontre d’ADAMA et exigeons  sa régularisation !

“Prenons soin des jeunes mineurs exilés, avec ou sans papiers”

Les dessins de cette courte séquence video sont l’oeuvre d’une artiste dessinatrice amateur , amie d’une personne très active dans le Collectif C.R.D.E..
Elle présente son travail ainsi :

“Je fais juste ce que je sais faire, prendre soin des jeunes et les accueillir chez moi. Découvrir cette réalité des mineurs isolés étrangers (M.N.A.) à la rue m’a profondément émue, et depuis je continue à faire tout mon possible, modestement, pour les aider comme je fais avec mes enfants.”